L'ex-commandant de police Philippe Pichon a comparu mardi 22 mai à Paris pour avoir communiqué à la presse en 2008 les fiches de Jamel Debbouze et Johnny Hallyday issues du Système de traitement des infractions constatées (Stic). Il est jugé pour "détournement d'informations confidentielles", "violation du secret professionnel" et "accès frauduleux au système en dehors de toute procédure". L'homme est en vif conflit avec le ministère de l'Intérieur depuis plusieurs années.
Cette première audience devant la 17e chambre du tribunal correctionnel a été entièrement consacrée à l'exposé d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par l'avocat de Philippe Pichon, Me William Bourdon. Le tribunal rendra sa décision sur ce point le 7 juin.
L'ex-commandant de police de 42 ans assume avoir transmis à un journaliste les fiches des célébrités Jamel Debbouze et Johnny Hallyday, alors qu'il était en poste à la première division de police judiciaire (DPJ). Ces fiches avaient été publiées par le site Bakchich dans un article intitulé "Tous fichés, même les potes de Nicolas Sarkozy".
Philippe Pichon a toujours argué que cette divulgation était un "geste citoyen" pour dénoncer les dangers du fichie de police Stic, qui comprend des millions de fiches sur des personnes mises en cause. En 2010, il avait persisté en publiant, avec le sociologue Frédéric Ocqueteau, un ouvrage fustigeant le fichier comme "un casier judiciaire parallèle défiant les lois et les valeurs de notre République".
"Dans ce dossier, il y a eu un acharnement du ministère de l'Intérieur insupportable", a dénoncé l'avocat de Philippe Pichon, rappelant notamment que son client avait été mis à la retraite d'office en 2009.
Tout en assurant que l'ex-commandant de police était "impatient que la justice soit rendue et bien rendue", Me Bourdon a posé une QPC sur l'imprécision de l'incrimination "violation du secret professionnel". Il existe "le secret médical, le secret défense, mais pas de secret de police", a-t-il plaidé, en souhaitant "que la loi soit revue".
Du côté de la partie civile, l'avocat de l'agent judiciaire du Trésor, Me Cyrille Mayoux a répliqué: "S'il n'y a pas de secret de police, il y a un secret d'enquête et un secret d'instruction", et un policier ne doit normalement accéder aux données du Stic que "pour les besoins d'une enquête".
Me Mayoux, qui représente l'Etat dans cette affaire, sollicite 4.000 euros de dommages et intérêts au titre du "préjudice d'image".
Le parquet, qui juge que la QPC n'est "pas sérieuse au sens juridique", s'est opposé à sa transmission à la Cour de cassation.