Publié le jeudi 08 novembre 2012 à 07h50 - La Caisse nationale militaire de Sécurité sociale de Toulon fait partie des organismes escroqués par l'infirmière.André Dupeyroux
Bien que l’ayant reconnue coupable d’avoir détourné plus d’un million d’euros à cinq caisses de Sécurité sociale, le tribunal correctionnel de Nice l’a condamnée à une peine aménageable
Devant les juges de la 6e chambre correctionnelle, ce mercredi, Fatima*, 50 ans, est en pleurs : « Je suis très honteuse d'être ici, j'ai tout détruit. Je sortais d'une maladie, j'étais seule, je buvais beaucoup et je prenais un somnifère. Je faisais les télétransmissions le soir quand mes enfants étaient couchés, mais je me rendais compte seulement le lendemain de la catastrophe... »
Étrange femme que cette ancienne infirmière libérale qui semble ne prendre conscience de l'ampleur de ses actes qu'après son interpellation, le 9 mars 2009 à Nice. Et après avoir passé quatre à cinq ans à détourner des sommes conséquentes au préjudice de la Sécurité sociale et de diverses autres caisses de santé**, pour un total de 1.007.530 € ! Elle surfacturait ses prestations aux organismes de santé, ou leur facturait des actes fictifs. Dans quel but ? Elle ne le dit pas, mais tout semble avoir été dépensé, selon son propre avocat, Me Philippe Soussi.
« C'était du suicide »
« Une erreur, je peux comprendre, lui lance la présidente, Colette Moreau-Zalma, mais ça a duré longtemps... »Étrange réponse : « J'aimais cette sensation de flottement quand j'étais devant mon ordinateur... C'était du suicide. »
« Combien pensez-vous avoir détourné ? » relance la présidente. « Je n'ose pas le dire... » Les avocats des caisses, Mes Alain Berdah et Joël Blumenkranz, sont moins timides : « Qu'elle ne puisse plus exercer en libéral ! », espère le premier. « Son addiction, c'est l'argent ! », assène le second. Le procureur, Hervé Leroy, complète : « Elle avait de la lucidité car elle privilégiait les caisses qui ne faisaient pas beaucoup de contrôles. Et, déjà en 1996 et 2002, elle a eu des alertes, à cause d'une activité élevée, mais elle n'en a pas tenu compte. »
Pour cette « atteinte à la solidarité nationale », il requiert trois ans de prison, dont deux avec sursis, mise à l'épreuve durant trois ans (obligation de rembourser), mais sans mandat de dépôt pour la partie ferme de la peine (elle a déjà purgé un mois de détention provisoire, le reste pouvant être aménagé). Le tribunal le suit, en réduisant toutefois la durée de la mise à l'épreuve à deux ans.
Sans doute a-t-il aussi bien entendu Me Soussi qui évoque, en défense, « la dimension humaine » de l'affaire : « Elle était certaine de se faire arrêter. Un exemple voyant le démontre : en neuf mois, elle a facturé 409.000 € à un même organisme pour un seul et même client ! »
*Son prénom a été changé : elle a retrouvé un travail salarié et doit rembourser les caisses escroquées.
**Les CPAM des Alpes-Maritimes et des Hauts-de-Seine, la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (Toulon), la Caisse d'assurance-maladie des industries électriques et gazières et la caisse RSI.
http://www.nicematin.com/nice/linfirmiere-qui-avait-detourne-1-million-deuros-a-la-secu-ne-retournera-pas-en-prison.1045402.html