PARIS (Reuters) - Le "tueur au scooter" recherché par les polices de France réunit selon des criminologues toutes les caractéristiques du meurtrier qui se sent investi d'une mission et veut créer sa "signature".
L'auteur du meurtre d'un rabbin et de trois enfants lundi dans une école juive de Toulouse, qui a aussi vraisemblablement tué la semaine dernière trois militaires d'origine maghrébine, est activement recherché pour cette série de crimes sans précédent en France.
"C'est un tueur en série déterminé, ayant une expérience des armes et ayant une mission", estime Alain Bauer, professeur en criminologie au Conservatoire national des arts et métiers.
Le président de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), organisme chargé des statistiques de la délinquance, note qu'il utilise au moins deux armes, dont un colt 45, "l'arme des truands et des militaires", et qu'il porterait une petite caméra autour du cou - "beaucoup de tueurs en série veulent garder des souvenirs".
La thèse du tueur en série qui s'estime investi d'une mission est également privilégiée par Laurent Montet, directeur de l'institut des hautes études en criminologie, qui souligne l'absence de "mobile classique", comme la vengeance, le crime passionnel ou encore l'argent.
"C'est un fantasme, une pathologie, ou les deux à la fois, qui motivent cet individu", dit-il. "À l'évidence, le narcissisme, la toute-puissance font partie de ses motivations. Mais au-delà, il y a, je pense, la volonté d'éradiquer, d'éliminer ceux dont il juge qu'ils ne méritent pas de vivre."
"EN MISSION VERSION COMMANDO"
Parce qu'il a visé des militaires d'origine maghrébine et une école de confession juive, certains observateurs l'ont comparé à Anders Behring Breivik, auteur, en juillet dernier, de deux attaques qui ont fait 77 morts en Norvège.
Dans un manifeste diffusé sur internet avant ses attaques, le "tueur d'Oslo", considéré comme fou par les experts, déclarait son ambition de déclencher une guerre pour défendre l'Europe contre une supposée suprématie musulmane.
"Il part en mission version commando, pour éradiquer une personne ou un groupe de personnes. Il s'auto-légitime, un peu comme le tueur d'Oslo", dit Laurent Montet.
Mais les similitudes entre les deux tueurs, de masse pour l'un, en série pour l'autre, ne vont pas plus loin.
"(Anders Behring Breivik) a fait tout ce qu'il fallait pour se faire prendre. Dans le cas présent, c'est un tueur en série répétitif, sûr de lui, organisé, méticuleux, et qui veut reproduire le plus possible ce type d'opération", estime Alain Bauer, un proche de Nicolas Sarkozy.
Le criminel, dont les motivations restent à ce jour inconnues, est en train de "créer sa propre signature", celle d'un homme entraîné et de sang-froid, ajoute-t-il.
Entre chacune de ses attaques, le tueur du Sud-Ouest a laissé passer quelques jours. Une "période d'accalmie" dans laquelle nous sommes aujourd'hui entrés, souligne Laurent Montet, au lendemain de la fusillade du collège-lycée juif.
"Il aime choquer la société", dit-il.
Aujourd'hui, deux scénarios sont donc envisageables d'après ce criminologue : un nouveau "coup d'éclat" dans quelques jours ou bien une disparition temporaire.
"Il peut tout à fait jouer la taupe, et fuir un temps pour mieux revenir une fois que ça s'est calmé", dit-il.
Edité par Yves Clarisse